Dans le cadre des Troisième Communication Nationale du Maroc à la Convention Cadre des Nations Unies sur le Changement Climatique
Principaux résultats
activités habilitantes liées à la CCNUCC et avec l’appui du PNUD/FEM, le Gouvernement marocain a entamé en 2014 la mise en œuvre du projet portant sur la préparation de la Troisième Communication Nationale (TCN). La préparation de cette Troisième Communication Nationale comporte un certain nombre d’étapes, à savoir :
- l’élaboration d’un inventaire national des gaz à effet de serre ;
- l’élaboration d’une étude de vulnérabilité et les politiques d’adaptation aux impacts du Changement Climatique ;
- l’analyse des possibilités d’atténuation des émissions de gaz à effet de serre ;
- l’évaluation des besoins en matière de renforcement des capacités. de financement et de transfert de technologies.
Sont présentés dans ce résumé les principaux résultats de l’inventaire des GES et les mesures d’atténuation préconisées ainsi que les principaux secteurs vulnérables aux Changement climatique. Les autres chapitres (renforcement des capacités, transfert de technologie et les questions transversales) sont présentés en détail dans la TCN.
1-Inventaire des gaz à effet de serre
Cinq inventaires des émissions de gaz à effet de serre ont été réalisés dans le cadre de la TCN. Ils portent sur les années 2005, 2006, 2008, 2010 et 2012.Nous présentons ci-après une synthèse des émissions et des absorptions de GES en 2010 (année de référence) et 2012 (dernière année d’inventaire).
1-1.Synthèse des émissions et des absorptions de GES au Maroc
Les émissions anthropiques nettes de GES au Maroc pour l’année 2012 sont évaluées à 100 547,4 Gg Eq-CO2, soit 3,10 tonnes Eq-CO2/habitant (contre 93 937,2 Gg Eq-CO2 en 2010 et 2,95 tonnes Eq-CO2/habitant). Ces émissions correspondent au solde des émissions totales de GES par les différentes sources (émissions brutes) et des absorptions de CO2 par les écosystèmes végétaux.
La contribution de gaz à effet de serre directs dans ces émissions en 2012 est la suivante :
CO2 : 66 538,7 Gg (contre 60 327,4 Gg en 2010).
CH4 : 783,453 Gg (contre 720,651 Gg en 2010).
N2O : 56,633 Gg (contre 59,60 Gg en 2010).
Absorptions de CO2 : 5 103,50 Gg (contre 4 942,60 Gg en 2010).
- Sur le plan sectoriel, le module Énergie, responsable d’environ 78% de dégagement de gaz carbonique et plus de la moitié des émissions globales des GES du Maroc, est de loin le premier émetteur du gaz carbonique et de GES en général avec 54,4% et 56,5% respectivement en 2010 et 2012. Ce module est aussi responsable de la majeure partie des émissions des gaz NOx et CO avec plus 99% chacun, des COVNM avec 66% environ et du SO2 avec 70%.
- Puis vient le module Agriculture avec 23,4% environ des émissions de 2010 (21,3% en 2012). Ce module est responsable en 2010 de plus de 92% des émissions de N2O et d’environ 33% des émissions de CH4. Ce module n’émet pratiquement pas de gaz carbonique.
- La part des émissions des modules Procédés Industriels est d’environ 10%, celle des déchets de 7,5% en 2010 et 7,9% en 2012, alors que celle du module Changement d’affectation des terres et foresterie est de 4,8% et 4,4% respectivement en 2010 et 2012.
Les émissions de CH4 du module déchets représentent 41,14% et 42,9% des émissions totales de ce gaz respectivement en 2010 et 2012.
2- mesures d’atténuation proposées à l’horizon 2040.
Les émissions nettes par habitant ont été évaluées à 2,95 tonnes EQ-CO2 per capita en 2010, année de référence. Elles devraient progresser à un rythme annuel moyen de 2,59% pour atteindre 6,35 tonnes EQ-CO2 per capita à l’horizon 2040.
L’établissement du scénario d’atténuation s’est basé sur des mesures susceptibles de réduire les émissions de GES tout en permettant au Maroc de faire face à ses défis de croissance économique et de développement social. Le scénario d’atténuation identifié comprend 49 mesures et projets visant l’atténuation des émissions de GES dans les différents secteurs émetteurs. Il totalise un potentiel moyen d’atténuation de l’ordre de 81,9 millions de Tonnes Eq-CO2 par année à l’horizon 2040.
En reprenant les émissions de la ligne de base selon le scénario de référence, les différentes mesures proposées permettent d’atténuer les émissions de GES de 62 958,50 Gg. Eq-CO2 en 2040, soit 24,74 % des émissions de la ligne de base de cette année.
3- Vulnérabilité aux impacts du changement climatique
La Vulnérabilité aux impacts du changement climatique au Maroc a été traitée pour les secteurs importants de l’économie (climat, ressources en eau, agriculture, forêts, littoral) à l’échelle nationale et au niveau de deux zones choisies dans le sud du pays à savoir le bassin de Souss-Massa et la zone des oasis.
Tendances climatiques observées et Projections à long termes.
Le changement climatique est déjà en cours au Maroc au vu des tendances climatiques observées entre 1960 et 2005. Les températures moyennes annuelles ont augmenté de 1,0 à plus de 1,8°C et les précipitations ont subi un déclin qui varie entre 3 et 30% avec une baisse de 26% dans la région Nord-Ouest du pays considérée comme la zone la plus humide du Maroc.
Pour tous les horizons temporels de projection considérés dans cette communication, on observe une tendance à la baisse des cumuls annuels des précipitations qui varie entre 10 et 20% pour atteindre 30% sur les provinces sahariennes à l’horizon 2100. Pour les températures moyennes annuelles, une tendance à la hausse de 0,5 à 1°C est projetée à l’horizon 2020 et de 1 à 1,5 °C aux horizons 2050 et 2080, sur l’ensemble du pays.
Impact sur les ressources en eau
Les résultats des projections climatiques et les différentes régressions statistiques établies entre les précipitations et les écoulements superficiels alimentant deux bassins versants et barrages étudiés dans le cadre de la présente étude (Hassan Addakhil par l’oued Ziz et Idriss 1er par l’oued Inaouene, bassin du Sebou) ont permis d’estimer l’impact probable du changement climatique sur les ressources en eau dans ces deux bassins, aux horizons 2020, 2050 et 2080. Les résultats indiquent clairement que les ressources en eau subiraient des baisses significatives par rapport à la période de référence 1950-2002. Les extrapolations au niveau national indiquent également que le capital eau (en m3/habitant/an) subirait une baisse importante à l’horizon 2050 et 2080, engendrant ainsi une situation de pénurie d’eau dès l’horizon 2020, quelque soit le scénario considéré.
Les projections effectuées sur les ressources en eau du bassin de Souss-Massa, montre, en considérant les mêmes taux d’accroissement de la population et de variation des ressources en eau qu’au niveau national, que l’impact du CC aggraverait continuellement la situation de pénurie d’eau que connait déjà ce bassin. En effet, le capital eau dans ce bassin qui est estimé à 447 m3/habitant/an en 2010, passerait en 2080 à 192 m3/habitant/an selon le scénario optimiste ou encore 123 m3/habitant/an selon le scénario pessimiste.
En ce qui concerne les zones oasiennes, les résultats des projections permettent de conclure que le changement climatique va fortement impacter leurs ressources en eau. En effet, à Zagora, le seuil de stress hydrique serait atteint entre les horizons 2040 et 2050 et à Ouarzazate, le seuil de pénurie d’eau serait atteint entre les horizons 2030 et 2050 .Les besoins en eau potable dans la zone des oasis augmenteraient par ailleurs de 50 à près de 130% en 2030 et de 67% à près de 380% en 2050, du fait de la croissance de la population. Le changement climatique accentuerait ainsi la détérioration de la situtaion hydrique dans les oasis.
Impact sur l’Agriculture
L’agriculture pluviale est très sensible aux aléas climatiques et notamment aux épisodes de sécheresses. La vulnérabilité du secteur BOUR est accentuée par les caractéristiques propres de ce système d’exploitation (traditionnel et vivrier, de faible productivité, etc.). L’impact du changement climatique se solderait par une réduction des rendements céréaliers de 50% à 75% en année sèche et de 10% en année normale (MAPM/ADA, 2012).
Le changement climatique se traduirait par un accroissement des besoins en eau des cultures irriguées compris entre 7 et 12% en raison de l’augmentation prévisible des températures et de l’évapotranspiration. La gestion peu efficiente de l’eau utilisée dans les périmètres irrigués constitue un facteur supplémentaire qui accentue la vulnérabilité de ce secteur face aux aléas climatiques.
Au-delà des différents scénarios envisageables, l’impact du changement climatique sur l’agriculture marocaine se manifesterait en premier lieu par la diminution de la disponibilité en eau pour l’irrigation et par une baisse de la productivité agricole, notamment celle des cultures pluviales. La production animale connaitrait des situations de détérioration corrélativement aux impacts négatifs sur la production végétale. Les projections climatiques préconisées indiquent que l’aridité augmenterait progressivement en raison de la diminution de la pluviométrie et de l’augmentation de la température. Ceci aurait des répercussions négatives sur les rendements agricoles surtout à partir de 2030.
Impact sur les écosystèmes forestiers
Le changement climatique a un impact certain sur les écosystèmes forestiers qui jouent un rôle important pour l’économie du pays et pour les populations riveraines. Dans des bioclimats saharien, semi-aride et aride, cela se traduit par un stress hydrique sur la végétation, ce qui favorisera l’extension de la désertification, et par conséquent, des déplacements progressifs de peuplements vers le Nord, à la recherche de fraîcheur et d’humidité. Dans les bioclimats humides et subhumides, la tendance est une évolution vers des bioclimats plus secs et la disparition de certaines espèces forestières telles que, le Sapin de Talasemtante, le cèdre de TiziIfri, le chêne liège de la nappe numidienne, le cèdre de Ketama au Rif, le genévrier thurifère du Haut Atlas. A ces disparitions, succèderaient des espèces plus adaptées au stress hydrique comme le thuya, le caroubier, le pin d’Alep, le pistachier et le genévrier rouge.
Les impacts découlant de la dégradation et de la déperdition du tissu végétal forestier auraient des conséquences sur la biodiversité, sur la productivité forestière et sur le bien-être des populations riveraines.
Impact sur la Biodiversité
Le dernier rapport national sur la biodiversité (2014) cite le changement climatique parmi les principales menaces et causes d’appauvrissement de la diversité biologique. L’enquête nationale sur l’état de conservation des zones humides entre 2000 et 2010, montre que dans 51% des cas étudiés, les évolutions observées sur les sites sont liées au changement climatique. Selon le même rapport, la moyenne annuelle des coûts économiques additionnels de la perte de biodiversité due au changement climatique est estimée à 300 millions de dollars US pour l’année 2010. À l’horizon 2030, selon un modèle intensif en carbone, couplé avec le changement climatique, l’inaction fera passer ce chiffre à deux milliards de dollars (DARA, 2012). La perte et l’érosion de la diversité génétique, en particulier en ce qui concerne les agriculteurs pauvres, est associée à la réduction de la sécurité alimentaire, à une incertitude économique accrue, à une plus grande vulnérabilité aux parasites et aux maladies, à la réduction des possibilités d’adaptation et à une accélération de la perte de connaissances locales sur diversité pour les générations futures.
Impact sur le littoral
Selon un rapport de la Banque Mondiale (BM, 2011), la fréquence annuelle des catastrophes naturelles (inondations, érosions et submersions marines) a augmenté régulièrement entre 1980 et 2006(plus de 15 en 2006).
Actuellement, de nombreuses plages souffrent de l’érosion, aussi bien sur la côte atlantique que sur la côte Méditerranéenne. Deux tiers des plages seraient déjà en érosion (IRES, 2010) et le risque sera intensifié avec le retrait prévu des plages qui pourrait atteindre 15 mètres d’ici 2030.
La submersion marine survient de manière épisodique. En 1956, 1657 et 1963 les villes de M’diq et de Martil ont été inondés par des marées et des tempêtes. En 1966 et 2010, Agadir a connu de fortes tempêtes qui ont causé de grands dégâts. Tout le long de la zone côtière de Casablanca les zones basses sont sujettes à des risques élevés de submersion marine, comme ce fut le cas du mini-tsunami en la côte Casablancaise en 2014.
Ces phénomènes font peser de lourdes menaces sur les ressources naturelles et les infrastructures (équipements portuaires, réduction de la surface des plages, réduction de la biodiversité, des zones humides en arrière plage et des écosystèmes des estuaires fluviaux, salinisation,…) avec des pertes économiques évaluées à plusieurs milliards de dirhams.
4- Besoins en financement
Les investissements de base requis pour la mise en œuvre des mesures d’atténuation sont estimés à près de 56,9 milliards de $US. Toutefois, globalement, ces mesures apportent un bénéfice net de 32 $/T.Eq-CO2, pour un bénéfice annualisé direct de 2 624 millions $US.
Les besoins financiers en matière de renforcement des capacités (atténuation et Adaptation) ont été estimés à 111,7 millions $US dont 89% pour la mise en œuvre des actions stratégiques transversaux (renforcement des capacités humaines, réglementaires et institutionnelles), 10% pour celles d’accompagnement des actions de financement et 1% pour les actions de suivi et évaluation.